Luthéranisme

Une communion aux dimensions du monde

01 septembre 2017

800 personnes étaient rassemblées du 10 au 16 mai à Windhoek, en Namibie, pour fêter les 500 ans de la réforme, faire le bilan de l’action de la Fédération luthérienne mondiale (FLM) ces sept dernières années et lui donner des priorités de travail pour les six ans à venir.

Célébrant : « Le Seigneur est avec vous » - assemblée : « Et avec ton esprit »… La personne à qui nous répondons cela est une femme philippine, en col clergé. Et lorsque vient le moment de se donner la paix, c’est le monde entier que l’on embrasse, à travers les personnes aux costumes et aux langues si divers, et qui pourtant, à cet instant, se sentent vraiment sœurs et frères en Christ. Je dois l’avouer, cette communion universelle manifestée par une cène prise ensemble m’a beaucoup émue.

L’émotion est là aussi lorsque des sœurs d’Afrique et d’Asie témoignent des violences et des discriminations dont elles sont victimes jusque dans l’Église. Lorsque des jeunes témoignent de la valeur que leur Église leur reconnaît quand elle les responsabilise et les forme, pour qu’ils puissent s’engager malgré leur inexpérience. Lorsque la présidente du comité des finances arrive à mettre l’humain au cœur des chiffres, à montrer l’accueil des personnes migrantes, le soin aux malades du cancer ou la formation de futur(e)s pasteur(e)s derrière les camemberts colorés du rapport de gestion.

Institution

Cette assemblée est l’occasion de découvrir un peu plus le monde luthérien, pour moi qui suis réformée. La Fédération luthérienne mondiale est très active, en particulier dans le domaine humanitaire (aide d’urgence et développement). Grâce à son réseau d’Églises, elle sait avant les ONG quelles sont les situations de tension et réagit rapidement et efficacement. Elle est reconnue et appréciée pour cela. Actuellement très engagée envers les réfugiés et déplacés, en particulier au Moyen-Orient, en Afrique centrale, en Afrique de l’Est, et aux portes de l’Europe (Hongrie, Turquie, Grèce), elle agit aussi dans les domaines de l’éducation, de l’adaptation aux changements climatiques, de l’accès à la terre. Elle soutient également les Églises pour favoriser la participation de tous, la formation théologique et la bonne gouvernance. Elle apporte une attention particulière à l’articulation entre théologie, plaidoyer et action sur le terrain.

Fragilité

La FLM est un colosse aux pieds d’argile : l’humanitaire représente aujourd’hui plus de 90 % de son budget. Elle fait ainsi rayonner l’Évangile, annonce la libération par la grâce pour tout être humain. Mais cet argent vient de pays en pleine sécularisation : jusqu’à quand les citoyens de ces pays accepteront-ils que leur aide publique d’État passe par une organisation confessionnelle ? Certaines Églises membres pourront-elle encore longtemps être si généreuses ? Et – c’est plus ici une question de fond qu’une question prospective – faut-il accepter que l’humanitaire continue de se développer alors que la théologie et le soutien à la mission des Églises commencent à voir leur budget se restreindre ?

Créativité

Heureusement, dans une communion d’Églises, tout ne passe pas par l’argent ou l’institution. Les Églises-membres font preuve d’une belle créativité. Les Églises du Sud se prennent de plus en plus en charge, sans attendre une aide – de plus en plus rare – des pays occidentaux ; développement et lutte contre les changements climatiques trouvent à s’articuler sans s’opposer. Le président élu, Filibus Musa, fait le choix d’axer son ministère sur la communion entre Églises membres et sur l’œcuménisme, pensé comme « diversité réconciliée ». Un choix en cohérence avec l’attitude de Martin Junge, le secrétaire général de la FLM, très attentif aux relations entre Églises, et qui trace de belles perspectives pour que la Fédération luthérienne mondiale continue à être une communion ecclésiale qui a du sens.

Claire SIXT GATEUILLE
pasteure en charge des relations internationales de l’EPUdF

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