Ciné miroir

Un miraclé!

23 février 2017
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Dans une grande ville du Québec, un sexagénaire au visage mangé par une barbe, marchant désormais avec une béquille (joué par un Thierry Lhermitte époustouflant) vient chercher l’urne qui contient les cendres de sa fille Marie. Il s’appelle Paul Sneijder et, deux mois plus tôt, il a été victime avec sa fille et d’autres personnes d’une chute d’ascenseur de plus de 90 mètres dont il est le seul survivant : un miraculé ! Après cet accident et plusieurs semaines d’hospitalisation et d’amnésie partielle, Paul Sneijder va ouvrir les yeux sur la réalité de sa vie de « cadre supérieur » à Montréal : un travail inintéressant, une femme intéressée qui le trompe, deux fils qui le méprisent… Pour continuer à vivre malgré tout, se reconstruire, il va commencer par changer de métier en devenant « promeneur des chiens » ! Ses proches vont-ils, eux, bien accepter ce changement de mode de vie qui le va le transformer en homme libre ?
Mort et Résurrection comme chemin de Conversion
L’agoraphobie et la claustrophobie de Paul Sneijder, conséquence du drame qu’il vient de vivre, sont ici le point de départ d’une quête de soi derrière un questionnement sur l’origine de ce malheur et de fait, sur le sens désormais de sa vie. Le film, au rythme lent mais jamais ennuyeux, nous plonge dans un cheminement à hauteur d’homme bien loin des clichés sur le « refaire sa vie/se reconstruire après l’épreuve » ou le « faire son deuil », etc. Paul, lui, ne va ni ne veut rien reconstruire ; il tentera plutôt de s’enfuir du monde où il vit, peut-être comme l’avait fait son père. Il fuit un monde qui le considère comme fou parce qu’il ne veut pas violer sa morale individuelle ; et surtout réclamer vengeance au travers d’un procès contre les constructeurs de l’ascenseur qui pourrait définitivement assurer le confort des siens, notamment les ambitions universitaires de ses deux fils nés de son second mariage. Pourtant Paul n’est donc pas un héros, c’est un homme qui, comme Job, crie sa détresse et veut surtout qu’on lui laisse sa liberté. Paul Sneidjer ne sait pas ce qu’il veut, mais il sait ce qu’il ne voudrait pas, qu’on s’enrichisse à partir de la perte d’un être cher, et que tout recommence comme avant !
En effet, cet homme durement éprouvé dans son cœur comme dans son corps, veut surtout changer radicalement de vie, et surtout quitter une femme qui ne l'aime plus mais veut diriger sa vie et celle de ses enfants. Changer de vie, faire demi-tour… n’est-ce pas là la définition même de la Conversion ?
Pas de Libération sans pertes !
Au final, voilà un excellent film franco-québécois, réalisé avec beaucoup de finesse et avec un jeu plein de justesse de la part de ses acteurs principaux... sans compter de beaux paysages enneigés sur le Saint Laurent. Ce film raconte donc une conversion, au sens littéral du terme, c'est-à-dire un changement radical de vie après un drame, une épreuve... changement qui ne plait pas à tout le monde, comme c'est souvent le cas dans la vie et comme le montre souvent les Évangiles, notamment le début de Marc 5 :
« Jésus dit : Sors de cet homme, esprit impur ! (…) 13 Et les esprits impurs sortirent, entrèrent dans les pourceaux, et le troupeau se précipita dans la mer (…) 15 Ils vinrent auprès de Jésus, et ils virent le démoniaque dans son bon sens ; et ils furent saisis de frayeur. 17 Ils se mirent à supplier Jésus de quitter leur territoire. … » (Marc 5,8)

 

En savoir plus

Film « La nouvelle vie de Paul Sneijder » (2016)
Réalisé par Thomas Vincent
Scénario de Thomas Vincent et de Yaël Cojot-Goldberg
Adaptation du roman Le cas Sneijder de Jean-Paul Dubois
Avec : Thierry Lhermitte, Géraldine Pailhas, Pierre Curzi
Durée : 1h54
Pays d’origine : France - Canada (Québec)
Genre : Comédie dramatique

Luc Serrano,
pasteur de l'Eglise protestante unie de France, à Rodez.

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