Femmes protestantes (9)

Madeleine Barot (1909-1995) et quelques femmes héroïques pendant la guerre

31 octobre 2018

Tous les mois, nous partons à la rencontre d’une femme qui a marqué l’histoire du protestantisme par son engagement, son charisme et ses idées novatrices. Éducation, théologie, santé, nous retrouvons ces femmes dans leur quotidien de foi.

Madeleine Barot, née à Chateauroux dans une famille intellectuelle nullement engagée dans l'Église, suit une formation de lettres et d'histoire. Membre active de mouvements de jeunesse protestants, la Fédé des étudiants et les Unions chrétiennes de jeunes filles, elle participe à la rencontre mondiale de jeunes en 1939. Elle se spécialise pour devenir bibliothécaire, puis obtient une bourse à l'École française de Rome. Elle commence une thèse de doctorat. En 1940, rapatriée en France, elle est embauchée par Suzanne de Dietrich comme secrétaire générale de la Cimade. Les Alsaciens déplacés n'ont plus besoin d'aide ; mais il y a urgence à s'occuper des détenus des camps du Sud-Ouest de la France (Gurs, Rivesaltes...) où s'entassent dans une grande misère et détresse des étrangers de provenances diverses, internés par le gouvernement Pétain. Madeleine Barot obtient que des équipières y pénètrent et y demeurent, au début au prétexte d'apporter des layettes pour les nouveau-nés. Peu à peu, elles organisent non seulement quelques soins, mais une écoute et une animation culturelle et spirituelle. Madeleine, qui peut en sortir, tient au courant les autorités protestantes, entre autres le pasteur Marc Boegner à Nîmes.

(© Mémorial de la Shoah-Paris)

 

Les thèses de Pomeyrol

Avec l'appui du pasteur Wilhelm Visser 't Hooft (futur responsable du Conseil œcuménique des Églises) et de Suzanne de Dietrich, venus de Genève, elle est à l'initiative de la réunion à Pomeyrol en septembre 1941 (en majorité des pasteurs), où sont rédigées les fameuses « Thèses de Pomeyrol » qui prennent position contre le nazisme et dénoncent tout antisémitisme. Elle prendra personnellement part ensuite à l'effort de la Cimade pour l'évasion de Juifs hors de France. En 1988 elle sera nommée « Juste parmi les nations » par Yad Vashem.

Après-guerre, toujours responsable de la Cimade, c'est elle qui organise les baraques d'entraide et de secours dans les villes les plus sinistrées de la côte atlantique. Puis en 1947, qui négocie l'ouverture de la baraque installée à Mayence pour un contact à établir avec des étudiants allemands bouleversés par la défaite allemande : première étape vers la réconciliation.

Après sept ans à la Cimade, Madeleine Barot initie au Conseil œcuménique des Églises le département « L'homme et la femme dans l'Église et la Société » qu'elle gère avec de nombreux voyages durant des années. Elle participe à la création de l'ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture). Elle manifestera jusque dans sa retraite, à Paris (1973), le discernement de tâches à entreprendre.

 

Des femmes d’exception

Pendant la Guerre, d'autres femmes ont risqué leur vie pour sauver des enfants juifs, pour fabriquer de faux papiers, pour soigner, secourir. Nous nous limitons ici à donner quelques noms. Le réseau d'accueil de Magda Trocmé au Chambon-sur-Lignon... les quatre « femmes de Dieulefit » (Jeanne Barnier, Marguerite Soubeyran, Catherine Krafft et Simone Monnier)... Adélaïde Hautval qui partage le sort de Juifs qu'elle a défendus ; à Auschwitz, médecin, elle refuse de participer aux opérations du Dr Mengele... Dora Rivière, médecin elle aussi à Ravensbrück... ou encore Annette Monod, surnommée « l'ange du Vel d'Hiv. » Elles ont pratiquement toutes reçu la médaille de « Justes »... D'autres ont milité directement dans la Résistance, comme la célèbre Berthie Albrecht…

 

 

 

 

En savoir plus

Pour aller plus loin

André Jacques, Madeleine Barot. Une indomptable énergie, 1989, Cerf, Labor et Fides.

Marjolaine CHEVALLIER,
maître de conférence honoraire à la faculté de théologie de Strasbourg

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