Aumônerie des prisons

La personne détenue, un être humain ?

16 janvier 2017

La période électorale précédant le scrutin pour l’élection du président de la République française est favorable à la floraison de toutes sortes de promesses faites par les candidats, dans tous les médias. Mais quels projets pour les prisons ? Quelles solutions préconisées pour lutter contre la surpopulation dans les maisons d’arrêt ? Quels engagements pour enrayer la récidive après une « sortie sèche » ?

 

Dans ce domaine, silence ! Pas d’engagements ! Les électeurs ne s’y intéressent pas ,ou sont hostiles, ou encore fuient le sujet. Ce n’est pas le moment de les indisposer ; il faut au contraire leur dire ce qu’ils ont envie d’entendre. Mais à propos, les électeurs, c’est nous !

 

Ce que chacun peut faire

On peut s’informer, participer à des conférences ou à des expositions. Les Journées nationales prison (JNP) de fin 2016 ont été, comme chaque année, l’occasion de prendre connaissance des enjeux du monde carcéral. Par exemple, un « culte prison » à l’Église protestante unie (EPU) d’Avignon ; une conférence du directeur interrégional des prisons PACA-Corse à l’EPU du Pays d’Aix ; l’exposition d’une maquette à taille réelle d’une cellule de prison à la faculté de droit d’Aix-en-Provence.

Maquette en taille réelle

d'une cellule de prison

(c) DR

 

Le thème des JNP 2016 était « Prison, vivre enfermé ». Ce fut l’occasion de se rappeler que dans la plupart des maisons d’arrêt, qui hébergent des personnes en attente de jugement ou en fin de courte peine, on entasse trois personnes dans 9 m2. Deux disposent de lits superposés et le troisième dort sur un matelas posé à même le sol, qu’il glisse la journée sous les deux autres lits pour pouvoir se déplacer dans la cellule. Ces trois personnes détenues passent ensemble 22 heures par jour dans ces 9 m2 totalement encombrés ; ils ont droit à deux fois une heure de promenade dans une petite cour extérieure. Vivre dans cette promiscuité est un cauchemar ; pas d’intimité, toujours sous les regards des deux autres, les fumeurs avec les non-fumeurs, la télévision à fond toute la journée, les odeurs de transpiration, etc. C’est inhumain.

 

Les chiens sont mieux traités

Pourtant, quel que soit le crime ou le délit commis par ces personnes, ce sont des êtres humains. Mais ils sont parfois moins bien traités que des animaux. J’en veux pour preuve l’arrêté du 3 avril 2014 fixant les règles sanitaires et de protection animale ; à l’annexe II (1), les dispositions spécifiques aux chiens précisent : « L’espace minimal requis pour l’hébergement des chiens est d’une surface de 5 m² par chien et d’une hauteur de 2 m… Pour les chiens dont la taille est supérieure à 70 cm au garrot, la surface d’hébergement ne peut être inférieure à 10 m²… Les chiens ont accès en permanence à une courette en plein air dont la surface est adaptée à leurs besoins en fonction de la race… Des dispositifs et accessoires appropriés sont mis en place pour favoriser l’occupation et le jeu. » (site du ministère de l'agriculture).

Nos personnes détenues disposent de 3 chacune, n’ont accès à une cour de plein air qu’une heure le matin et une heure l’après-midi et aucun accessoire n’est prévu pour favoriser l’occupation et le jeu dans leur cellule si on excepte la télévision.

 

« Tu as tout mis sous ses pieds... »

La Bible exalte pourtant l’être humain ; le psalmiste s’extasie devant l’Homme (2) : « Qu’est-ce que l’être humain, pour que tu t’occupes de lui ? Tu l’as fait de peu inférieur à un dieu, tu l’as couronné de gloire et de magnificence. Tu lui as donné la domination sur les œuvres de tes mains, tu as tout mis sous ses pieds, moutons, bœufs, tous ensemble, et même les bêtes sauvages, les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, tout ce qui parcourt les sentiers des mers. » (Psaume 9.6-9).

Notre société place la personne détenue juste en dessous du chien ! 3 m² pour l’un 5 à 10 m² pour l’autre.

 

Pierre LEGRAND
aumônier régional protestant des prisons PACA-Corse

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