C'est quoi

La justification ?

24 mars 2017

La loi était là comme guide pour nous conduire à Christ, afin que nous soyons justifiés par la foi (Paul, lettre aux Galates). Étant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ (Paul, lettre aux Romains, 5.1).

Ces deux phrases de Paul, nous les avons entendues dans de nombreuses prédications, et la deuxième est affichée fréquemment dans nos temples. Mais que veut dire « être justifié par la foi » ? Le Larousse nous indique que justifier c’est disculper quelqu’un d’une accusation, le mettre hors de cause, et aussi appuyer l’exactitude de quelque chose par des preuves.

Justifier quelqu’un, se justifier, justifier un résultat, rien de tout cela ne permet de comprendre l’expression « justifiés par la foi ».

Lettre aux Romains V, commentaires de Paul

Que nous disait Luther ?

La justification est le cœur, le noyau central, de la pensée de Luther, et c’est ce dogme qui sera repris, siècle après siècle, par les Églises issues de la Réforme.

Luther voyait une simultanéité du péché et de la justice, et il expliquait : (…) l’homme est toujours pécheur, toujours dans la pénitence, toujours juste. La pénitence, c’est le mouvement de l’injuste vers le juste. (…) Si donc nous sommes toujours pécheurs, nous sommes toujours en pénitence, et pour cette raison même, toujours aussi justes et toujours en train d’être justifiés.

Ce raisonnement – qui ne devait pas trop plaire au milieu augustin d’où sortait Luther – nous fait comprendre ce qu’est la justification.

Si nous prenons le mot au sens actuel, alors l’expression « justification par la foi » a très peu de sens. Mais si, par justifier, nous entendons « devenir juste » tout devient clair ; on dit justifier – devenir juste – comme on dit bonifier – devenir bon –, clarifier – devenir clair –, etc.

Nous sommes justifiés par la foi, c’est-à-dire que la foi nous rend justes.

   
 

 

Alors, qu’est-ce qu’être juste ?

La justice, au sens biblique, est un terme ambigu. Pour les intégristes pharisiens, comme pour beaucoup de gens d’aujourd’hui, la justice a pour but de vérifier l’obéissance à la Loi, et en déduire, selon le cas, une rétribution ou une punition. Mais dans l’Ancien Testament le mot hébreu tsedaka, qui est couramment traduit en français par « justice », signifie au contraire le rétablissement dans ses droits de la veuve, de l’orphelin et de l’immigré qui ont été spoliés par des puissants malfaisants. Ce qui fait que « justice » en hébreu correspondrait plutôt à « amour », en français, on pensera davantage à cet usage du mot dans « justice sociale ».

Il est important de comprendre droitement le sens du mot « juste », rappelons-nous l’étonnante négociation d’Abraham avec Dieu à propos de Sodome et Gomorrhe : à cause de ces dix justes, je ne détruirai pas la ville (Gn 18).

Donc, on adoptera plutôt le sens de « bon pour son prochain ». Alors le texte de Paul comme les écrits de Luther nous deviennent plus clairs : la foi nous justifie, c’est-à-dire qu’elle nous aide à aimer notre prochain.

 
 
Les Justes dans le sein d'Abraham, musée Unterlinden (Colmar), milieu du XIIe siècle

 

Gilles Carbonell

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