Cest quoi

La double prédestination chez Calvin ?

01 mars 2017

Dans la relation avec Dieu, le salut ne se négocie pas, avait affiché Luther. Mais de nouvelles interrogations s’étaient fait pressantes : peut-on contribuer à son propre Salut ? Aux yeux de Calvin, ce questionnement est périlleux. Car il craint qu’il n’égratigne la place centrale de Dieu : Il donne, seul par la grâce. Il n’y a pas de place pour une participation humaine.

Porrtrait de Jean Calvincréé pour le 500e anniversaire

de sa naissance, Bourges

Une conviction : Dieu est maître

Calvin affirme : tout est joué d’avance. Tout est déjà gagné. Dieu a décidé avant l’origine du monde. Calvin est convaincu que sa conception débarrasse le croyant de toute spéculation sur Dieu. Il n’a plus besoin de s’embarrasser des questions du salut. Car tout est décidé, il est libre d’agir.

Calvin déclare que la prédestination est double : les uns prennent la voie du salut... là où d’autres sont rejetés sans qu’ils sachent le pourquoi. Le croyant connaît uniquement sa propre condition. Aucun jugement sur la situation des autres n’est possible ; le choix de Dieu est insondable.

Portrait de Jean Calvin créé pour le 500e anniversaire de sa naissance, Bourges

Un écho de la lecture biblique

Basée sur une lecture des textes bibliques, Calvin accentue sa conception de la double prédestination au fil des ans. J’ai aimé Jacob et j’ai haï Esaü, cette parole du premier chapitre de Malachie résonne avec la lecture de Jean Calvin. L’accueil de Jacob et le rejet d’Esaü sont une réalité que Dieu assume ; Il ne s’en explique pas.

Calvin fait apparaître ceux qui sont sauvés ET ceux qui sont rejetés. Le petit « et » est central dans sa pensée : sauvés les uns ET perdus les autres. Même si ces passages sont peu nombreux, il faut leur donner leur place.

Une certitude personnelle

Calvin affirme qu’on peut vivre dans une confiance profonde ; il l’appelle certitudo salutis. Elle fait le lien vers Dieu. Dans son intimité Calvin peut crier vers Dieu « Abba » - « Père ». Cette expérience le rend paisible. Pour Calvin, cette relation pacifiée se dit à travers la parole biblique Celui qui est enfant de Dieu écoute les paroles de Dieu. Aucun doute.

L’historienne du protestantisme, Jeannine Garisson, souligne cette assurance tranquille, largement partagée au XVIe siècle : le vécu religieux du protestant baigne dans une absolue et tranquille certitude, celle de figurer au nombre des élus. (...) Aucune équivoque sur l’assurance d’appartenir au troupeau choisi par Dieu. L’élection va de soi.

Une réaction piégée

La doctrine de la double prédestination se profile dans un contexte historique précis : elle veut répondre aux affirmations du Concile de Trente(1) qui vient de se terminer. Mais Calvin contre également le médecin et prédicateur Bolsec. Lui, comme le cardinal Sadolet, avait insisté sur l’initiative humaine dans l’accueil de la grâce. Calvin flaire le danger d’un retour des œuvres : il creuse le choix souverain de la part de Dieu.

Dès son accentuation de la pensée de la double prédestination, Calvin est contesté par ses contemporains. Ainsi Théodore de Beèze cherche à lui faire entendre à quel point ses affirmations risquent de compromettre la prédication de la grâce.

(1) Le Concile de Trente (1545-1563) est convoqué par le pape Paul III ; il cherche à contester la Réforme protestante en réformant l’Église catholique romaine.

Angelika Krause

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