Dossier Les femmes théologiennes

Faire de la théologie. Nouer une corde à trois brins

05 mars 2019

Marion Muller-Colard est aujourd’hui la théologienne la plus connue du grand public. Son écriture nourrit pasteur·e·s et membres des communautés locales. Elle les libère même ! Échange avec Emanuelle Seyboldt, présidente du Conseil national de l’Église protestante unie de France.

Emmanuelle Seyboldt, présidente du
Conseil national de l'EPUdF
@Wikipedia.com

Ensemble : Quel est le livre par lequel vous avez découvert Marion Muller-Colard ?

Emmanuelle Seyboldt : Job, l’autre Dieu. Son premier livre, en fait.

Ensemble : Qu’est-ce qui vous a frappée ?

E.S. : Je crois que c’est sa manière de nouer ensemble l’existentiel, un événement vécu, le questionnement théologique et l’analyse d’un texte biblique. Ce qui m’a passionnée, c’est qu’elle élabore une pensée théologique à partir de ces trois brins. Dans ma pratique pastorale, cela m’a enrichie. Mais sur le plan personnel, cela m’a profondément libérée. Cela m’a autorisée à penser ce que je pensais. Très souvent, je ne m’autorisais pas à prendre au sérieux mes pensées. Mais le fait de voir que quelqu’un, en partant de ses questions personnelles, élaborait une pensée, je me suis sentie autorisée à le faire. Je me suis autorisée à voir dans ces questions du quotidien de la matière pour nourrir une pensée théologique.

Ensemble : L’avez-vous suivie ?

E.S. : J’ai résisté à acheter Le complexe d’Élie, mais on me l’a offert… La lecture m’a passionnée. Et quand L’intranquillité est sorti, je me suis précipitée dessus. C’est ce que je vis depuis des décennies ! La Bible est un livre qui m’empêche de dormir. Les discours des prophètes sur une société injuste, sur les inégalités… Quelqu’un mettait enfin un mot sur ma foi. Non pas un apaisement, mais une charge, un engagement de tous les jours. Ce n’est pas une camomille ni un calmant. Il y avait un tel écho avec ma vie que cela m’a nourrie et me nourrit.

Ensemble : Est-ce que vous trouvez dans cette théologienne une manière particulière de dire la théologie ?

E.S. : Peut-être le fait qu’elle ose écrire et décrire les affects, les sentiments. Une chose que j’ai moins rencontrée chez les théologiens hommes, sans doute aussi est-ce là le fruit de l’éducation…

Propos recueillis par Christophe Jacon
journal Ensemble

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