Lire Genèse 6 à 9

Divine alliance

20 avril 2020

Invitation à relire malheurs et image de Dieu avec le récit du Déluge.

Extraits de Genèse chapitres 6 à 9 (Traductions Segond, Alliance biblique universelle 1992 et 2002)

Le Seigneur vit que le mal des humains était grand sur la terre, et que leur cœur ne concevait jamais que des pensées mauvaises. Le Seigneur regretta d’avoir fait les humains sur la terre… Le Seigneur dit : j’effacerai les humains que j’ai créés...

Le Seigneur dit à Noé : Entre dans l’arche, toi et toute ta maison ; car j’ai vu que tu es juste parmi les contemporains. Prends auprès de toi sept couples de toutes les bêtes… afin de garder en vie leur descendance sur toute la terre… je vais faire venir la pluie sur la terre, et j’effacerai de la surface du sol tous les êtres que j’ai faits…

Le déluge dura sur la terre pendant quarante jours… les eaux étaient de plus en plus grosses sur la terre… Les eaux couvrirent les montagnes et les dépassèrent… tout ce qui était animé d’un souffle de vie dans les narines et qui était sur la terre ferme mourut…

Dieu se souvint de Noé, de tous les animaux et de tout le bétail qui se trouvaient avec lui dans l’arche… les sources de l’abîme se fermèrent et les eaux se retirèrent de la terre…

La colombe revint à Noé sur le soir, elle tenait dans son bec une feuille d’olivier toute fraîche. Noé sortit…

Dieu dit : Voici le signe de l’alliance que je place entre moi et vous, ainsi que tous les êtres vivants qui sont avec vous pour toutes les générations à venir… l’arc sera dans la nuée, et je le regarderai pour me souvenir de l’alliance perpétuelle entre Dieu et tous les êtres vivants qui sont sur la terre.

Le Déluge…

L’histoire biblique de la Création est connue. Adam et Eve, puis tout de suite après la violence entre les cultivateurs, Caïn, et les bergers, Abel. La violence qui se déchaîne : l’Éternel vit que la méchanceté de l’homme était grande sur la terre, et que chaque jour son cœur ne concevait que des pensées mauvaises… l’Éternel regretta d’avoir fait l’homme sur la terre… l’Éternel dit « j’effacerai l’homme que j’ai créé » (Genèse 6,5-7). Le Déluge fut. Noé et sa famille se réfugièrent sur l’arche avec deux animaux de chaque espèce vivante pour qu’ils survivent avec lui… et tout ce qui était animé d’un souffle de vie et qui était sur la terre mourut. L’histoire est connue. Elle se termine par la colombe au rameau d’olivier et l’arc-en-ciel. De la colombe au rameau d’olivier, la Bible et Picasso ont fait un symbole universel de paix. L’arc-en-ciel rend heureux l’homme… « après la pluie, le beau temps ! ».

 

La colombe signe de l’espérance, l’arc-en-ciel signe de l’alliance. Des signes bibliques passés dans le langage commun… Étonnant de constater combien notre culture est imprégnée d’images bibliques, quand notre société se pense sécularisée.

 

« Plus jamais… » dit Dieu 

Je place mon arc dans la nuée -dit Dieu- il sera un signe d’alliance entre moi et le terre, je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous… les eaux ne se transformeront plus en déluge pour détruire toute vie… j’établis mon alliance avec vous (Genèse 9, 13 ; 15). La « morale de l’histoire » est simple, d’une simplicité toute évangélique, à la portée de chacun.e : le déluge qui détruit toute vie ne sera plus jamais décision de Dieu.

 

Depuis le Déluge, Dieu n’est plus derrière les malheurs du monde. Les hommes ne doivent plus le croire. Évident, aujourd’hui, dans la société sécularisée occidentale, mais une nouveauté absolue dans le monde religieux au sein duquel circulait le récit biblique finalisé du Déluge (500 ans avant Jésus-Christ). Nouveauté qui au fil des siècles a participé au développement de l’agriculture de l’élevage, de l’habitat, des transports… et au final participe après Copernic (XVIème), Galilée (XVIIème), et le Siècle des Lumières (XVIIIème), au développement de la recherche médicale et scientifique, et la sécularisation. Longue histoire millénaire dont nous sommes les héritiers aujourd’hui, à l’heure de l’épidémie du coronavirus.

 

Chaque fois que nous contemplons un arc-en-ciel, nous devrions nous souvenir nous aussi, comme Dieu, de cette alliance passée entre Lui et nous. Soigner plutôt que souffrir, combattre plutôt que subir… telle est devenue la place de l’homme dans la Création après le Déluge. Contre le mal et les malheurs…

 

 

En savoir plus

Glossaire

Déluge : Le Déluge représente les eaux. Le terme est ancien, d’origine babylonienne (mabbûl), et établi dans les écrits bibliques (entre 800 et 500 avant J.-C.).

Arche : teba en hébreux, langue du livre biblique de la Genèse. Mot d’origine égyptienne qui désigne une caisse fabriquée avec des roseaux (qânîn), matière utilisée par les Égyptiens pour calfeutrer leurs navires. Notons que la description de l’arche évoque plus l’architecture d’un temple que celle d’un bateau.

 

Histoire, contexte

L’histoire biblique du Déluge est un entrelacement artistique de deux sources compilées, le récit jahviste (850 av J.-C.) et le récit sacerdotal (500 av J.-C.). Un texte assyrien (700 av J.-C.), l’Épopée de Gilgamesh, raconte aussi une histoire de déluge, sans doute d’origine beaucoup plus ancienne.

C’est dire que, plutôt que de chercher une véracité naturelle ou historique au Déluge, mieux vaut savoir pour le lecteur d’aujourd’hui, que les « grandes inondations » sont images courantes dans les traditions culturelles du Moyen-Orient un millier d’années avant J.-C.

Aujourd’hui, trois mille années plus tard, sans doute évoquerions-nous plus facilement un brutal anéantissement nucléaire ou l’inexorable réchauffement climatique… mais la question resterait : quelle alliance pour que la vie humaine, bénie de Dieu, continue ?

Pour méditer

C’est la faute à qui ?

Le malheur n’est la punition de rien… il est juste absurde et bête à pleurer (Olivier Abel, philosophe). La gloire développe la jalousie parmi les hommes, et le malheur développe le ressentiment.

Puisque Dieu, depuis le Déluge, n’est plus en cause dans nos malheurs, qui va porter le chapeau ? Comment éviter le virus du bouc-émissaire ?

L’Évangile propose une voie, adopter le point de vue des victimes, celui de l’homme de la Croix. Mais la porte est étroite

Bertrand Vergniol
pasteur à Libourne

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